MASSUE U'U
L'art de la parure aux Iles Marquises Plus de 15000 kilomètres nous séparent de l'archipel isolé des Iles Marquises. Le premier Européen à les avoir aperçus est Alvaro de Mendana de Neira, lors de son voyage reliant le Pérou aux Iles Salomon en 1595. Il fallut deux siècles avant qu'un navigateur occidental ne pose finalement le pied à terre. Ce dernier fut James Cook, qui y séjourna plus d'un mois. L'archipel ne devint définitivement un Etablissement Français d'Océanie qu'à partir de 1842, lorsque l'Amiral Aubert du Petit-Thouars en prit possession au nom de la France. La société ancestrale marquisienne était divisée en deux classes distinctes : celle des chefs civils (haka'iki) et des chefs religieux (tau'a) en opposition au reste de la population. Tel que nous l'explique Philippe Bihouée dans L'art ancestral des Iles Marquises (Chartres, 2009), le haka'iki est l'héritier d'une lignée d'ancêtres valeureux s'étant illustrés par le combat ou par leur bravoure. Divinisés, ces derniers ont accédés au panthéon marquisien et sont personnifiés sous la forme d'êtres anthropomorphes appelés tiki, dont la représentation orne les parures, les objets cérémoniaux et surtout les lieux de culte. Les tau'a organisent les funérailles et les principales cérémonies telles que le rituel du percement des oreilles à l'âge de dix ans et surtout l'application des premiers tatouages lors de la puberté. C'est à cette occasion que les marquisiens se rassemblent sur de vastes espaces publiques et se parent de leurs plus beaux atours. Chaque individu porte les insignes propres à son rang, tels que le bâton de commandement pour les chefs et la massue u'u pour les guerriers. Si les ornements du quotidien sont plus simples, les parures de fêtes sont spectaculaires : diadèmes de plumes, imposants pendants d'oreille en ivoire sculpté, couronnes en dents de dauphin, en coquillage ou en écaille de tortue. Les ivi po'o, représentant l'être tiki, ornent les tambours, les conques et les cheveux. Les personnes de rang modeste pouvaient se revêtir de tapa habillement drapé, et réservé aux grandes occasions. L'art de la parure atteint de véritables sommets aux Iles Marquises. Les éléments naturels, méthodiquement choisis pour leur qualité et leur importance aux yeux des insulaires, sont sublimés par une sculpture habile et maîtrisée ou par un tressage fin et ordonné. Il faut également, avec un peu d'imagination, essayer de remettre dans leur contexte ces oeuvres s'inscrivant au sein de cérémonies complexes. Tel que nous l'explique Claude Stéfani (in ibid), ces "objets étaient mis en situation, prenant leur réelle dimension dans un univers culturel, celui de l'Océanie, qui privilégiait les arts immatériels comme la danse ou la parade et où l'agencement, à priori éphémère, des parures avait la même importance que leur beauté intrinsèque." More than 15000 kilometers separate us from the isolated archipelago of the Marquesas Islands. The first European to locate them was Alvaro de Mendana de Neira during his expedition from Peru to the Solomon Islands in 1595. Two centuries later, Captain James Cook, arrived and stayed for more than a month. The archipelago definitively became a French Establishment in 1842, when the Admiral Aubert du Petit-Thouars took possession of the territory on behalf of France. The ancestral Marquesan society was divided in two distinct groups: on one side the civil chiefs (haka'iki) and religious chiefs (tau'a) and on the other side, the rest of the population. As Philippe Bihoue explains in L'art ancestral des Iles Marquises (Chartres, 2009), the haka'iki is the heir to an important ancestral linage, renown for their braveness and ability in combat. Deified, the latter have access to the Marquesan pantheon and are personified by anthropomorphic figures called tiki. These representations decorate adornments, ceremonial objects and especially places of worship. Funerals and important ceremonies, such as the ear piercing for ten year old children and the first tattoo when they reach puberty, are organized by the tau'a. For these occasions, the Marquesans would gather around large public plazas, and wear their most magnificent adornments. Everyone wore an insignia proper to his rank, such as the authority staff for chiefs and the u'u clubs for warriors. If the daily adornments were quite simple, the ones worn during festivities were spectacular: feather tiaras, large carved ivory ear pendants, crowns decorated with dolphin teeth, shells or tortoiseshell. The ivi po'o ornaments, representing a tiki, were used to decorate drums, conchs and hair. People from modest social rank could dress themselves with tapa, skillfully wrapped, and reserved for important events. The art of adornment reached a very high level in the Marquesas Islands. Natural materials, carefully selected for their quality and importance for the islanders, were sublimated by a skillful and controlled carving or by delicate and refined weaving. It is also important to try to imagine all these works of art is their original context, as they appeared during complex ceremonies. Claude Stéfani (in ibid) explains that "these objects, placed in their context, culminated in complete signification inside their own cultural environment, the Island one, which privileged immaterial art such as dance or parade and where the adornments, a priori ephemeral, had the same importance through their intrinsic beauty."
MASSUE U'U

ILES MARQUISES

Details
MASSUE U'U
Iles Marquises
Arme de combat et objet de prestige, ce superbe casse-tête marquisien représente une figure masculine. Ici, le corps fortement stylisé est réduit à l'essentiel : une tête et un pénis. Les yeux "solaires" sont symbolisés par deux têtes de tiki en haut relief tandis qu'une troisième tête sculptée au centre de la traverse marque le nez. L'extrémité du long manche, enveloppée dans de la corde de fibre de coco, se termine par une forme phallique stylisée et évasée. La partie supérieure de l'objet concentre une grande prolifération décorative : des visages sont gravés de chaque côté du sommet du casse-tête ainsi qu'au-dessus des projections latérales. Un double bandeau de motifs géométriques inspirés des tatouages corporels encadrent un large visage aux traits purs.

Note de l'inventaire Bottet
Iles Marquises, numéro 5
Casse-tête (Uu'). Il offre deux petites têtes de tiki de profil au-dessus des bras latéraux un petit lézard est sculpté sous l'une des têtes centrales. Un petit personnage parmi les motifs de l'une des zones ornées inférieures. L'une des faces, est atteinte d'un manque de matière produit par la décomposition du bois en cet endroit. La poignée a conservé sa ligature. Patine presque noire. Rousseau, 18000F.

Hauteur: 150 cm. (59 in.)
Provenance
Monsieur Rousseau
Bernard et Bertrand Bottet, Nice
Further details
MARQUESAS ISLANDS CLUB, U'U

Brought to you by

Charles-Wesley Hourdé
Charles-Wesley Hourdé

Lot Essay

Cf. Meyer, A.J.P, L'art ancestral des Iles Marquises, Chartres, 2008, p.46 pour une massue u'u conservée au Muséum d'Histoire Naturelle de Lille sous le numéro d'inventaire 990.2.1146.
Afin d'obtenir cette superbe teinte marron, cette massue sculptée dans un bois de fer était enterrée pendant une longue période dans un champ de taros puis soigneusement frottée à l'huile de coco. A.J.P. Meyer insiste sur le génie créatif des sculpteurs marquisiens : "Sur aucune autre oeuvre provenant du Pacifique, l'artiste - et on peut ici parler d'artiste dans tous les sens du terme-, n'a exprimé un tel degré de maîtrise, de virtuosité et d'imagination."

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