Lot Essay
Après une formation à Munich auprès de l'artiste Hans Donauer, Rottenhammer arriva à Venise vers 1591. Ses premiers dessins italiens témoignent d'une étude approfondie de l'art de Titien, Véronèse et Tintoret. Un séjour à Rome, en 1594-5, lui permit de faire la connaissance des paysagistes Paul Bril puis Jan Brueghel l'Ancien. La collaboration entre Rottenhammer et Brueghel fut très vite fructueuse, le retour de ce dernier à Anvers en 1596 n'empêchant pas le développement de leur coopération. Une lettre envoyée par Brueghel à son mécène le cardinal Frédéric Borromée, dans laquelle il recommande son ami allemand, témoigne de la proximité des deux artistes. Brueghel et Rottenhammer exécutèrent ensemble, vers 1597, un petit tableau sur cuivre, Diane et Actéon, aujourd'hui conservé à la Staatsgalerie à Stuttgart. L'existence d'un dessin préparatoire circulaire, signé par Rottenhammer et daté 1597, permet de penser que celui-ci peignit tout d'abord les personnages avant d'envoyer le tableau à Anvers pour complétion. (voir cat. exp. cité, nos 36-37). Dans le mariage de Bacchus et d'Ariane, au contraire, les traces d'une date plus ancienne, située au dessus de la signature et quasiment illisible (1601?) nous incitent à émettre l'hypothèse que Jan Brueghel exécuta tout d'abord paysage et nature morte avant d'envoyer l'oeuvre inachevée à son confrère. La première signature aurait alors été effacée par Hans Rottenhammer qui l'aurait remplacée par la sienne. L'un des artistes actifs à Venise les plus renommés, Rottenhammer aurait pu agir ainsi pour des raisons commerciales. Plus précisément, Rottenhammer travaillait alors comme agent pour le compte de Rodolphe II de Prague. Selon le biographe Carlo Ridolfi, Rodolphe II avait commandé à Rottenhammer un Festin des dieux payé 500 scudi; ce tableau, capital dans la carrière de Rottenhammer car il lui aurait ouvert de nombreuses portes, est aujourd'hui disparu. Notre festin des dieux a sans doute été peint pour un mécène important, ce qu'indiquent la perfection de l'exécution mais aussi la qualité et la dimension du cuivre ou l'emploi de matières précieuses comme le lapis-lazuli. Ce mécène pourrait-il avoir été Rodolphe II, sans doute le souverain européen le plus connaisseur en matière artistique à cette époque?
Le festin des dieux a été peint deux ans après le Mariage de Neptune et Amphitrite, chef d'oeuvre de Hans Rottenhammer conservé à l'Ermitage. Notre tableau reprend, en sens inverse, le personnage féminin assis de dos, qui apparait dans plusieurs oeuvres et dont la source pourrait être un bas-relief antique (voir cat. exp. cité, p. 48). Le personnage de Bacchus, dont les traits personnalisés et quelque peu vieillissants peuvent intriguer, est quant à lui repris dans un autre festin (collection privée). Il pourrait s'agir d'un autoportrait. L'opposition entre Bacchus, faunes et putti malades, à droite, et le groupe constitué par Apollon et ses Muses, à gauche, pourrait par ailleurs être une allégorie de la lutte entre le vice et la vertu (voir E.-M. Froitzheim-Hegger,Sie lebten dahin sorglos in behaglicher Ruhe. Studien zum niederländischer und flämischer Göttermahl, Hildesheim, 1993, p. 170). Selon Klaus Ertz, il n'est pas certain que la scène représentée soit bien celle des noces de Bacchus et d'Ariane. Le personnage féminin qui tend une grappe de raisin à Bacchus pourrait aussi être Cérès (voir K. Ertz, Jan Brueghel der Altere, Lingen, 2008, Vol. II, p. 804). La richesse et la variété des scènes représentées semblent autoriser plusieurs lectures de ce tableau.
Renaud-César-Louis de Choiseul, duc de Praslin (1735-1791), était le fils de César-Gabriel de Choiseul. Celui-ci avait constitué en son hôtel de Belle-Isle, quai de la Grenouillère, et en son château de Vaux-le-Vicomte une immense collection que le fils enrichit encore. En 1793, 114 tableaux, la plupart flamands et hollandais, furent dispersés lors de la vente après décès; un portrait de femme de Rembrandt et Le Roi boit, de Jacob Jordaens, aujourd'hui à l'Ermitage, figuraient dans cette vente. Le lot 72 était "un tableau de la plus riche ordonnance et du plus précieux détail dans toutes ses parties ; il représente un festin des Dieux dans un site de paysage, composé de bosquets agréables. Cette partie, peinte par Brueghel de Velours, est de la plus étonnante finesse pour l'exécution. Tous les accessoires de fleurs, coquillages et les mets qui couvrent la table, sont de la main de Van Kessel. Ces trois artistes ont travaillé d'un accord parfait, pour produire un ouvrage aussi éclatant que précieux. Parmi les différens groupes de ce morceau, composé de cinquante figures, on remarque Sylène ivre sur la droite, et nombre d'enfans qui semblent avoir pris grand part au repas. Nous citons cet ouvrage comme l'un des plus riches et des plus achevés de J. Rothenamer".
Une copie anonyme de ce tableau est conservée au musée de l'Ermitage à Saint-Petersbourg. Une autre, avec un fond de paysage simplifié et plus clair, par Hendrick van Balen, est aujourd'hui au musée des Beaux-Arts de Leipzig.
Nous remercions le Dr. Klaus Ertz, qui a confirmé l'attribution à Hans Rottenhammer et Jan Brueghel I après examen de l'oeuvre et le Dr. Heiner Borggrefe de son aide.
Le festin des dieux a été peint deux ans après le Mariage de Neptune et Amphitrite, chef d'oeuvre de Hans Rottenhammer conservé à l'Ermitage. Notre tableau reprend, en sens inverse, le personnage féminin assis de dos, qui apparait dans plusieurs oeuvres et dont la source pourrait être un bas-relief antique (voir cat. exp. cité, p. 48). Le personnage de Bacchus, dont les traits personnalisés et quelque peu vieillissants peuvent intriguer, est quant à lui repris dans un autre festin (collection privée). Il pourrait s'agir d'un autoportrait. L'opposition entre Bacchus, faunes et putti malades, à droite, et le groupe constitué par Apollon et ses Muses, à gauche, pourrait par ailleurs être une allégorie de la lutte entre le vice et la vertu (voir E.-M. Froitzheim-Hegger,Sie lebten dahin sorglos in behaglicher Ruhe. Studien zum niederländischer und flämischer Göttermahl, Hildesheim, 1993, p. 170). Selon Klaus Ertz, il n'est pas certain que la scène représentée soit bien celle des noces de Bacchus et d'Ariane. Le personnage féminin qui tend une grappe de raisin à Bacchus pourrait aussi être Cérès (voir K. Ertz, Jan Brueghel der Altere, Lingen, 2008, Vol. II, p. 804). La richesse et la variété des scènes représentées semblent autoriser plusieurs lectures de ce tableau.
Renaud-César-Louis de Choiseul, duc de Praslin (1735-1791), était le fils de César-Gabriel de Choiseul. Celui-ci avait constitué en son hôtel de Belle-Isle, quai de la Grenouillère, et en son château de Vaux-le-Vicomte une immense collection que le fils enrichit encore. En 1793, 114 tableaux, la plupart flamands et hollandais, furent dispersés lors de la vente après décès; un portrait de femme de Rembrandt et Le Roi boit, de Jacob Jordaens, aujourd'hui à l'Ermitage, figuraient dans cette vente. Le lot 72 était "un tableau de la plus riche ordonnance et du plus précieux détail dans toutes ses parties ; il représente un festin des Dieux dans un site de paysage, composé de bosquets agréables. Cette partie, peinte par Brueghel de Velours, est de la plus étonnante finesse pour l'exécution. Tous les accessoires de fleurs, coquillages et les mets qui couvrent la table, sont de la main de Van Kessel. Ces trois artistes ont travaillé d'un accord parfait, pour produire un ouvrage aussi éclatant que précieux. Parmi les différens groupes de ce morceau, composé de cinquante figures, on remarque Sylène ivre sur la droite, et nombre d'enfans qui semblent avoir pris grand part au repas. Nous citons cet ouvrage comme l'un des plus riches et des plus achevés de J. Rothenamer".
Une copie anonyme de ce tableau est conservée au musée de l'Ermitage à Saint-Petersbourg. Une autre, avec un fond de paysage simplifié et plus clair, par Hendrick van Balen, est aujourd'hui au musée des Beaux-Arts de Leipzig.
Nous remercions le Dr. Klaus Ertz, qui a confirmé l'attribution à Hans Rottenhammer et Jan Brueghel I après examen de l'oeuvre et le Dr. Heiner Borggrefe de son aide.