Lot Essay
Hormis leurs masques, les Dan sont également réputés pour leurs cuillères figuratives magnifiquement sculptées dans le bois, connues sous le nom de wakemia ou wunkirmian, qui signifie littéralement ‘cuillère de festin’. Une si grande cuillère de cérémonie, en plus d’être un bien précieux, était le symbole du statut du wunkirle ou wakede, la femme la plus hospitalière de chaque quartier de la ville. La wunkirle gagnait sa réputation grâce à sa générosité exceptionnelle. Mais l'honneur de ce titre s’accompagnait de nombreuses obligations et responsabilités. Wakemia servait principalement de bâton de danse lors des cérémonies. Pendant les fêtes, chaque wakede brandissait sa cuillère à travers la ville en dansant tout en étant accompagnée d'autres femmes de son quartier qui jouaient sur des gongs fendus ou des pots remplis de riz bouilli et de soupe. La wakede utilisait sa cuillère pour diviser la nourriture parmi les invités, plus précisément pour indiquer la répartition qu’elle souhaitait. Au cours de ces festivités, les différents wunkirle du village entraient en compétition pour élire la plus généreuse d’entre elles. Cette performance de toutes les wakede constituait un rassemblement spectaculaire. C’était également une véritable célébration de l'importance du rôle des femmes dans la société. Les sculpteurs créèrent une grande variété de wunkirmian visible par la singularité de chaque poignée. Habituellement, les cuillères se terminent par une tête humaine stylistiquement typique des Dan. Dans tous les exemples, les cuillerons représentent un ventre, enfanté par du riz, la nourriture offerte par la wakede lors des fêtes. Les deux visages aux regards opposés symboliseraient la capacité surnaturelle du gle (une force de l'esprit) à voir simultanément dans toutes les directions (Himmelheber, op.cit., p. 168).
Tandis que les cuillères à une seule tête sont assez communes chez les Dan et les Wé, les exemples janus sont extrêmement rares : un exemplaire appartient notamment au New Orleans Museum of Art (77.277). Cette cuillère, anciennement dans la collection Victor Kiam, présente des similitudes stylistiques avec une cuillère à tête unique de la collection Karob, publiée dans Four Dan Sculptors de Barbara C. Johnson (Fine Arts Museum of San Fransisco, 1986, p 72, no.15). Cette dernière a été collectée en 1933 par Alfred Tulk au Blimiple (Libéria), près de Butuo. Une troisième cuillère a été acquise par Hans Himmelheber au Belewale (Libéria) en 1949-1950 (publiée dans Negerkunst und Negerkünstler, Braunschweig, 1960, p.163, no.130). Ces trois cuillères sont attribuées à Zlan (ou Sran) de Belewale, qui est sans conteste la personnalité la plus forte parmi les sculpteurs du territoire artistique Dan-Wé dans la première moitié du XXème siècle. L'influence de son style unique est perceptible chez les Dan, les Mano et les Wé au Libéria et en Côte-d'Ivoire. Sa carrière a été largement documentée par Himmelheber: il a été le sculpteur de nombreux chefs et hommes influents mais aussi l'enseignant de nombreux élèves des deux peuples Dan et Wé. Ce grand nombre d'apprentis, copiant méticuleusement le travail de leur maître a rendu l’indentification certaine et absolue difficile des œuvres de Zlan. Fait unique parmi les Dan, l'une des épouses de Zlan est aussi connue pour avoir sculpté des cuillères ainsi que d'autres objets dans le style du maître. Eberhard Fisher a récemment écrit sur Zlan et son entourage dans «Les Maîtres de la sculpture de la Côte d'Ivoire" (Paris, 2015, pp. 128-138).
Tandis que les cuillères à une seule tête sont assez communes chez les Dan et les Wé, les exemples janus sont extrêmement rares : un exemplaire appartient notamment au New Orleans Museum of Art (77.277). Cette cuillère, anciennement dans la collection Victor Kiam, présente des similitudes stylistiques avec une cuillère à tête unique de la collection Karob, publiée dans Four Dan Sculptors de Barbara C. Johnson (Fine Arts Museum of San Fransisco, 1986, p 72, no.15). Cette dernière a été collectée en 1933 par Alfred Tulk au Blimiple (Libéria), près de Butuo. Une troisième cuillère a été acquise par Hans Himmelheber au Belewale (Libéria) en 1949-1950 (publiée dans Negerkunst und Negerkünstler, Braunschweig, 1960, p.163, no.130). Ces trois cuillères sont attribuées à Zlan (ou Sran) de Belewale, qui est sans conteste la personnalité la plus forte parmi les sculpteurs du territoire artistique Dan-Wé dans la première moitié du XXème siècle. L'influence de son style unique est perceptible chez les Dan, les Mano et les Wé au Libéria et en Côte-d'Ivoire. Sa carrière a été largement documentée par Himmelheber: il a été le sculpteur de nombreux chefs et hommes influents mais aussi l'enseignant de nombreux élèves des deux peuples Dan et Wé. Ce grand nombre d'apprentis, copiant méticuleusement le travail de leur maître a rendu l’indentification certaine et absolue difficile des œuvres de Zlan. Fait unique parmi les Dan, l'une des épouses de Zlan est aussi connue pour avoir sculpté des cuillères ainsi que d'autres objets dans le style du maître. Eberhard Fisher a récemment écrit sur Zlan et son entourage dans «Les Maîtres de la sculpture de la Côte d'Ivoire" (Paris, 2015, pp. 128-138).