Lot Essay
Notre tableau fut pour la première fois identifié comme étant un témoignage inédit de la rencontre du jeune Mozart avec Thomas Linley par Geneviève Geffray à l'occasion de l'exposition Mozart, Bilder und Klänge en 1991. Cette scène s'inscrirait à un moment particulier de la vie de Mozart, alors qu’il entreprend avec son père Léopold un voyage de quinze mois en Italie pour parfaire son éducation et se faire connaître en tant que musicien auprès de la noblesse locale.
Nous sommes en mars-avril 1770 et Mozart a quatorze ans lorsqu’il séjourne à Florence chez Giuseppe Maria Gavard des Pivets, administrateur général des finances à la cour du Grand-Duc de Toscane (frère de l’empereur Joseph II). L’enfant prodige y rencontre le virtuose anglais du même âge, Thomas Linley (1756-1778), avec lequel il donne un petit récital pour leur famille d’adoption. C’est cet épisode précis que le peintre aurait choisi d’immortaliser.
Linley était considéré en Europe comme l’un des violonistes les plus talentueux de son temps. Sa rencontre avec Mozart et leur nouvelle amitié sont relatées dans une lettre de Léopold Mozart datée du 21 avril 1770 à Rome : « A Florence, nous avons retrouvé un jeune Anglais, élève du célèbre violoniste Nardini. Cet enfant qui joue merveilleusement bien, est de la taille et de l’âge de Wolfgang et vint chez Sgra Corilla, une poétesse cultivée à qui nous rendions visite sur recommandation de M. Laugier. Les deux jeunes garçons se produisirent à tour de rôle toute la soirée, en s’embrassant maintes fois. Le lendemain, le petit Anglais – qui est un enfant charmant – fit apporter chez nous son violon et joua tout l’après-midi, Wolfgang l’accompagnant au violon. Le lendemain nous avons déjeuné chez M. Gavard, l’administrateur des finances du grand-duc, et les deux garçons ont joué tout l’après-midi à tour de rôle, non pas comme des enfants mais comme des hommes. Le petit Tomaso nous accompagna chez nous et pleura amèrement lorsqu’il sut que nous partions le jour suivant. » (W.A. Mozart, Correspondance, Edition de la Fondation Internationale Mozarteum Salzbourg, 1986, I. 1756-1776, p.227). L’amitié qui unissait Mozart et Linley fut courte mais profonde, comme en témoigne peu après une lettre du jeune Mozart adressée à son ami.
Il nous faut cependant appréhender le sujet de notre tableau avec précaution. En effet, certains historiens ont plus récemment avancé des arguments iconographiques et vestimentaires qui pourraient remettre en doute l'identité des modèles.