Lot Essay
LE POUVOIR DU GRASSLAND
Il n’est pas rare parmi les Bamiléké que de grands serviteurs soient élevés, en fin de carrière, au rang suprême de wambo, ce qui les assimile presque à la personne du roi. Une telle ascension sociale leur confère notamment le privilège de détenir un portrait, ce qui n’est autrement réservé qu’au roi. Réalisées à titre exceptionnel, et après autorisation spéciale du fon, en remerciement de mérites notoires, ces effigies incarnent au plus haut degré l’importance du statut social. Dans ce sens, il n’est pas rare de voir le notable représenté arborant des symboles nobiliaires telles que des coupes ou des pipes.
Comme le remarque Pierre Harter, ces portraits commémoratifs, dont le lot présent est un exemplaire redoutable, se distinguent des portraits royaux par leur taille, étant en général de plus petites dimensions. Ils conservent les meilleures qualités plastiques, dignes des plus importants portraits royaux (cf. Harter, P. Arts anciens du Cameroun, Arnouville, 1986, p. 61). Le portrait de la collection Caput se démarque des autres statues connues de même style par son dynamisme exceptionnel et le rythme unique de ses formes. On y décèle la pleine expression et toute la force du génie artistique du Grassland. Les meilleures créations plastiques de cette région se révèlent typiquement peu soucieuses de respecter cette « loi de frontalité », qui autrement a conduit aux attitudes hiératiques communes dans le reste des arts africains. Icône de l’« expressionisme » Bamiléké, elle représente de manière quintessentielle toutes les qualités dues aux licences techniques que l’on associe typiquement avec la grande statuaire du Grassland : l’asymétrie du corps et du visage, le décalage des hanches et des épaules, les bras animés de mouvements inégaux, la rotation du torse habilement suggérée, le rythme spiralé des jambes, tout ce qui, comme le remarque Pierre Harter, « n’est pas manque de technique mais technique…». (ibid., p. 60).
Pour un couple de statues de style analogue, identifié par Harter de style Bawok, voir ibid., 1986, p. 62, n° 53. Pour une autre statue de style similaire, voir celle du Reiss-Engelhorn-Museen de Mannheim, inv. n° IV AF 7420, acquise en 1912 et provenant de la collection de Franz Thorbeck.
THE POWER OF GRASSLANDS
It is not uncommon among the Bamileke for great servants to be elevated to the supreme rank of wambo at the end of their career, which places them almost at the same level as the king. Such a social ascension confers on them the privilege of owning a portrait, which is otherwise reserved only for the king. Produced exceptionally, and after special authorisation from the fon, as a recognition for notable merits, these effigies convey the importance of social status to the highest degree. In this sense, it is not uncommon to see the notable represented with nobilary symbols such as cups or pipes.
As Pierre Harter notes, these commemorative portraits, of which the present lot is a formidable example, differ from royal portraits in size, these being generally smaller. They retain the best plastic qualities, worthy of the most important royal portraits (cf. Harter, P., Arts anciens du Cameroun, Arnouville, 1986, p. 61). The portrait from the Caput collection stands out from other known statues of the same style by its exceptional dynamism and the unique rhythm of its shapes. It conveys the full expression and strength of the Grassland artistic genius. The best plastic creations from this region are typically unconcerned with respecting this “law of frontality”, which otherwise led to the hieratic attitudes common in the rest of African art. An icon of Bamileke “expressionism”, it represents in a quintessential way all the qualities achieved through the technical skill that one typically associates with the great statuary of Grassland: the asymmetry of the body and face, the shifting of the hips and shoulders, the arms animated by unequal movements, the skilfully suggested rotation of the torso, the spiral rhythm of the legs, all this, as Pierre Harter remarks, “is not a lack of technique, but a technique...” (ibid., p. 60)
Cf. for statues featuring a similar style, identified by Harter as the Bawok style, see the couple published in ibid., 1986, p. 62, no. 53. For another statue in the same style, see the one in the Reiss-Engelhorn-Museen of Mannheim, inv. no. IV AF 7420, acquired in 1912 and stemming from the collection of Franz Thorbecke.
Il n’est pas rare parmi les Bamiléké que de grands serviteurs soient élevés, en fin de carrière, au rang suprême de wambo, ce qui les assimile presque à la personne du roi. Une telle ascension sociale leur confère notamment le privilège de détenir un portrait, ce qui n’est autrement réservé qu’au roi. Réalisées à titre exceptionnel, et après autorisation spéciale du fon, en remerciement de mérites notoires, ces effigies incarnent au plus haut degré l’importance du statut social. Dans ce sens, il n’est pas rare de voir le notable représenté arborant des symboles nobiliaires telles que des coupes ou des pipes.
Comme le remarque Pierre Harter, ces portraits commémoratifs, dont le lot présent est un exemplaire redoutable, se distinguent des portraits royaux par leur taille, étant en général de plus petites dimensions. Ils conservent les meilleures qualités plastiques, dignes des plus importants portraits royaux (cf. Harter, P. Arts anciens du Cameroun, Arnouville, 1986, p. 61). Le portrait de la collection Caput se démarque des autres statues connues de même style par son dynamisme exceptionnel et le rythme unique de ses formes. On y décèle la pleine expression et toute la force du génie artistique du Grassland. Les meilleures créations plastiques de cette région se révèlent typiquement peu soucieuses de respecter cette « loi de frontalité », qui autrement a conduit aux attitudes hiératiques communes dans le reste des arts africains. Icône de l’« expressionisme » Bamiléké, elle représente de manière quintessentielle toutes les qualités dues aux licences techniques que l’on associe typiquement avec la grande statuaire du Grassland : l’asymétrie du corps et du visage, le décalage des hanches et des épaules, les bras animés de mouvements inégaux, la rotation du torse habilement suggérée, le rythme spiralé des jambes, tout ce qui, comme le remarque Pierre Harter, « n’est pas manque de technique mais technique…». (ibid., p. 60).
Pour un couple de statues de style analogue, identifié par Harter de style Bawok, voir ibid., 1986, p. 62, n° 53. Pour une autre statue de style similaire, voir celle du Reiss-Engelhorn-Museen de Mannheim, inv. n° IV AF 7420, acquise en 1912 et provenant de la collection de Franz Thorbeck.
THE POWER OF GRASSLANDS
It is not uncommon among the Bamileke for great servants to be elevated to the supreme rank of wambo at the end of their career, which places them almost at the same level as the king. Such a social ascension confers on them the privilege of owning a portrait, which is otherwise reserved only for the king. Produced exceptionally, and after special authorisation from the fon, as a recognition for notable merits, these effigies convey the importance of social status to the highest degree. In this sense, it is not uncommon to see the notable represented with nobilary symbols such as cups or pipes.
As Pierre Harter notes, these commemorative portraits, of which the present lot is a formidable example, differ from royal portraits in size, these being generally smaller. They retain the best plastic qualities, worthy of the most important royal portraits (cf. Harter, P., Arts anciens du Cameroun, Arnouville, 1986, p. 61). The portrait from the Caput collection stands out from other known statues of the same style by its exceptional dynamism and the unique rhythm of its shapes. It conveys the full expression and strength of the Grassland artistic genius. The best plastic creations from this region are typically unconcerned with respecting this “law of frontality”, which otherwise led to the hieratic attitudes common in the rest of African art. An icon of Bamileke “expressionism”, it represents in a quintessential way all the qualities achieved through the technical skill that one typically associates with the great statuary of Grassland: the asymmetry of the body and face, the shifting of the hips and shoulders, the arms animated by unequal movements, the skilfully suggested rotation of the torso, the spiral rhythm of the legs, all this, as Pierre Harter remarks, “is not a lack of technique, but a technique...” (ibid., p. 60)
Cf. for statues featuring a similar style, identified by Harter as the Bawok style, see the couple published in ibid., 1986, p. 62, no. 53. For another statue in the same style, see the one in the Reiss-Engelhorn-Museen of Mannheim, inv. no. IV AF 7420, acquired in 1912 and stemming from the collection of Franz Thorbecke.