Lot Essay
Avec sa palette très vive de couleurs primaires et son saisissant ballet de formes géométriques, Sans titre (1970) est parfaitement représentative du langage visuel si particulier, si reconnaissable d'Alexander Calder. Exécutée au crépuscule de la vie de l'artiste, une période marquée par des commandes d'État monumentales, cette œuvre porte le sceau d'une carrière exceptionnelle. Ici, les divers éléments de la composition se fragmentent et se dispersent dans une pléiade hypnotique de formes abstraites. Une nuée de cercles part à la rencontre d'ellipses, évoquant de complexes systèmes solaires constellés de lunes blanches, de soleils rouges et jaunes, de percées noires... Né en 1898 à Philadelphie dans une famille d'artistes, Calder doit principalement sa notoriété à son œuvre sculpté, et plus spécifiquement à ses fameux mobiles cinétiques initiés au début des années 1930 : on ne présente plus ces structures d'une grande délicatesse, composées de feuilles de métal suspendues à des fils, qui laissent flotter dans le vide leurs élégantes formes. Ici, en transposant ces « dessins dans l'espace » sur une surface plane, l'artiste traduit parfaitement aux deux dimensions du papier cette idée d'un univers tout en mouvement.
C'est en 1953, lors d'un séjour d'un an à Aix-en-Provence, que Calder peint sa première suite de gouaches. Installé avec sa famille dans une petite maison au hameau des Granettes, il aménage un atelier de fortune à l'intérieur d'un hangar à charrettes. Au contact de la splendeur du Midi, de son soleil, de sa nature luxuriante naît un engouement pour la gouache ; celle-ci devient une partie intégrante de sa pratique jusqu'à sa mort en 1976. La peinture à l'eau s'avère en effet parfaitement adaptée au procédé de Calder, très spontané. Ici, son emblématique palette bleue, rouge, jaune, blanche et noire rappelle ses influences premières. L'artiste parle ainsi de ce rapport à la couleur : « Je veux que les choses soient différenciées. Du noir et du blanc tout d’abord, puis du rouge, et ensuite, j'hésite. [...] Je voudrais tout peindre en rouge tant cette couleur me plaît. Je me dis parfois que j'aurais rêvé d'être un fauve en 1905 » (A. Calder et K. Kuh, ‘Alexander Calder', The Artist’s Voice: Talks with Seventeen Modern Artists, New York, 2000, p. 41).
Lorsqu'il quitte New York pour Paris en 1926, Calder s'immerge très vite dans les milieux d'avant-garde de la capitale où il fréquente entre autres Marcel Duchamp, Piet Mondrian et Paul Klee. S'il se nourrit volontiers de ces influences, les liens d'amitié qu'il tisse avec Joan Miró – l'amitié de toute une vie – seront sans doute plus déterminants encore pour son évolution stylistique. L'affinité entre les deux artistes est particulièrement frappante dans les gouaches de Calder, dont les motifs, ni tout à fait abstraits, ni tout à fait biomorphiques, revêtent une forte portée symbolique. Issue d'une période tardive de sa maturité, cette œuvre de 1970 est habitée par l'esprit géométrique et les composants avec lesquels il a bâti l'ensemble de son art. Réalisée deux ans après que Calder devient officier de la Légion d'Honneur en 1968, Sans titre témoigne de sa passion infatigable pour la gouache et révèle une faculté virtuose à faire naître sur le papier le même dynamisme, la même kinesthésie qu'il a su cultiver dans les trois dimensions de la sculpture.
C'est en 1953, lors d'un séjour d'un an à Aix-en-Provence, que Calder peint sa première suite de gouaches. Installé avec sa famille dans une petite maison au hameau des Granettes, il aménage un atelier de fortune à l'intérieur d'un hangar à charrettes. Au contact de la splendeur du Midi, de son soleil, de sa nature luxuriante naît un engouement pour la gouache ; celle-ci devient une partie intégrante de sa pratique jusqu'à sa mort en 1976. La peinture à l'eau s'avère en effet parfaitement adaptée au procédé de Calder, très spontané. Ici, son emblématique palette bleue, rouge, jaune, blanche et noire rappelle ses influences premières. L'artiste parle ainsi de ce rapport à la couleur : « Je veux que les choses soient différenciées. Du noir et du blanc tout d’abord, puis du rouge, et ensuite, j'hésite. [...] Je voudrais tout peindre en rouge tant cette couleur me plaît. Je me dis parfois que j'aurais rêvé d'être un fauve en 1905 » (A. Calder et K. Kuh, ‘Alexander Calder', The Artist’s Voice: Talks with Seventeen Modern Artists, New York, 2000, p. 41).
Lorsqu'il quitte New York pour Paris en 1926, Calder s'immerge très vite dans les milieux d'avant-garde de la capitale où il fréquente entre autres Marcel Duchamp, Piet Mondrian et Paul Klee. S'il se nourrit volontiers de ces influences, les liens d'amitié qu'il tisse avec Joan Miró – l'amitié de toute une vie – seront sans doute plus déterminants encore pour son évolution stylistique. L'affinité entre les deux artistes est particulièrement frappante dans les gouaches de Calder, dont les motifs, ni tout à fait abstraits, ni tout à fait biomorphiques, revêtent une forte portée symbolique. Issue d'une période tardive de sa maturité, cette œuvre de 1970 est habitée par l'esprit géométrique et les composants avec lesquels il a bâti l'ensemble de son art. Réalisée deux ans après que Calder devient officier de la Légion d'Honneur en 1968, Sans titre témoigne de sa passion infatigable pour la gouache et révèle une faculté virtuose à faire naître sur le papier le même dynamisme, la même kinesthésie qu'il a su cultiver dans les trois dimensions de la sculpture.