拍品專文
Parmi les nombreuses oeuvres que la statuaire aztèque nous a laissées, les réceptacles tiennent une place particulière par leurs formes et leurs fonctions supposées. Trois variétés peuvent être considérées : les tepetlacalli, les cuauhxicalli et les « autels ». Les tepetlacalli sont de véritables coffrets, fermés par un couvercle et abritant des restes humains ou des offrandes sacrificielles. Les cuauhxicalli, le plus souvent zoomorphes (félins, aigles), comportent une sorte de cuve destinée – selon les sources – à accueillir le cœur de la victime après le sacrifice. La troisième catégorie, à laquelle la littérature scientifique donne le nom « d'autel », affiche une très grande unité formelle : cubes parfois imposants dont la partie supérieure est aménagée d'une cavité plane et peu profonde.
La fonction de ces « autels » n’est pas définie avec certitude puisque les sources les citant sont peu précises. Si l'on peut douter de ce rôle, au sens traditionnel du terme (espace au-dessus duquel se déroule la cérémonie), il est en revanche certain que ces structures étaient étroitement liées aux rites en tant que réceptacles et lieux d'exposition voire de consumation des reliefs du sacrifice (restes humains, sang, nourriture, liquides, parfums, objets de culte, etc.).
Ces « autels », dans leur majorité, sont décorés de bas-reliefs de natures variées : représentations de divinités, personnages humains engagés dans des actions cérémonielles et sacrificielles, animaux, dates, symboles calendaires et cosmographiques.
La sculpture ici présente, certainement en basalte, est décorée sur ses quatre faces latérales de bas-reliefs représentant visiblement des jours du calendrier rituel aztèque (fondé sur le cycle de 20 noms et 13 chiffres). On peut distinguer, opposés, « Un-Jaguar » et « Dix-Jaguar », alors que ce qui pourrait être « Sept-Crocodile » est placé entre les deux. La quatrième face est illustrée par « Quatre-Mouvement », glyphe extrêmement important symbolisant le « Cinquième monde », celui des Aztèques. Successeur de quatre Ères précédentes il doit, comme les précédentes, être détruit par une catastrophe finale.
Ce motif eschatologique est associé à la partie supérieure du réceptacle qui, malgré les destructions, pourrait représenter Tlaltecuhtli (le monstre chthonien attrapant les âmes des morts) dont on distingue encore les griffes sur les bords.
Cependant, la forme peu régulière du bassin, semblant « mordre » dans la représentation du monstre, et les destructions l'affectant (et l'effaçant) pourraient être le résultat d'un profond remaniement du début de la période coloniale : le creusement ou surcreusement de la surface de la sculpture afin d'y aménager un bénitier voire une cuve baptismale.
Ainsi, par-delà les bouleversements culturels et religieux, et comme ce fut bien souvent le cas, les arts anciens des Amériques se sont perpétués au sein du Nouveau monde.
Pascal Mongne
Docteur en archéologie et historien de l’art, chargé de Cours à l’Ecole du Louvre, Pascal Mongne se consacre principalement à l’évolution de l’image européenne des Amériques depuis la Découverte et à la question du Faux en art précolombien. Il est membre de l’ArchAm (« Archéologie des Amériques » UMR 8096, CNRS - Université Paris 1), du GEMESO (Groupe d’Etudes Méso-Américaines, EPHE) et du Comité français pour le Corpus Antiquitatum Americanensium (Union académique internationale).
Imposant autel quadrangulaire en basalte gris, sculpté avec vigueur sur ses quatre faces d’une évocation des jours du calendrier aztèque, avec une représentation sur deux côtés d’un féroce félin accroupi avec des crocs et des griffes sortis ainsi que des moustaches émergeant de motifs ondulés avec de petits cercles sur leur surface, et comportant des indications de nombres dont l’un représente la date « Un Jaguar » et l’autre « Dix Jaguars », sculpté sur un autre côté d’une figure anthropomorphe animée qui porte une peau déchiquetée et une impressionnante mâchoire supérieure de créature qui est probablement celle du « Sept Crocodile », Teociopactli, un monstre marin primitif asexué mi-crocodile mi-poisson avec un silex, ou couteau Tecpatl, qui sort de son dos, et sculpté sur son quatrième côté d’une représentation circulaire évoquant « Quatre Mouvement », la partie supérieure de l’autel représentant une iconographie partielle de Tlalteuctli, le Monstre de la Terre, avec ses griffes de félin distinctives en saillie lorsqu’il incarne ce rôle de monstre terrestre et qui encadre un bassin peu profond qui résulte peut être d’une transformation postérieure de la période coloniale.
Pour un autel monolithique aztèque réutilisé après la conquête comme réceptacle, voir Luján et Fauvet-Berthelot, Paris, 2005 : p. 174, n° 83.
La fonction de ces « autels » n’est pas définie avec certitude puisque les sources les citant sont peu précises. Si l'on peut douter de ce rôle, au sens traditionnel du terme (espace au-dessus duquel se déroule la cérémonie), il est en revanche certain que ces structures étaient étroitement liées aux rites en tant que réceptacles et lieux d'exposition voire de consumation des reliefs du sacrifice (restes humains, sang, nourriture, liquides, parfums, objets de culte, etc.).
Ces « autels », dans leur majorité, sont décorés de bas-reliefs de natures variées : représentations de divinités, personnages humains engagés dans des actions cérémonielles et sacrificielles, animaux, dates, symboles calendaires et cosmographiques.
La sculpture ici présente, certainement en basalte, est décorée sur ses quatre faces latérales de bas-reliefs représentant visiblement des jours du calendrier rituel aztèque (fondé sur le cycle de 20 noms et 13 chiffres). On peut distinguer, opposés, « Un-Jaguar » et « Dix-Jaguar », alors que ce qui pourrait être « Sept-Crocodile » est placé entre les deux. La quatrième face est illustrée par « Quatre-Mouvement », glyphe extrêmement important symbolisant le « Cinquième monde », celui des Aztèques. Successeur de quatre Ères précédentes il doit, comme les précédentes, être détruit par une catastrophe finale.
Ce motif eschatologique est associé à la partie supérieure du réceptacle qui, malgré les destructions, pourrait représenter Tlaltecuhtli (le monstre chthonien attrapant les âmes des morts) dont on distingue encore les griffes sur les bords.
Cependant, la forme peu régulière du bassin, semblant « mordre » dans la représentation du monstre, et les destructions l'affectant (et l'effaçant) pourraient être le résultat d'un profond remaniement du début de la période coloniale : le creusement ou surcreusement de la surface de la sculpture afin d'y aménager un bénitier voire une cuve baptismale.
Ainsi, par-delà les bouleversements culturels et religieux, et comme ce fut bien souvent le cas, les arts anciens des Amériques se sont perpétués au sein du Nouveau monde.
Pascal Mongne
Docteur en archéologie et historien de l’art, chargé de Cours à l’Ecole du Louvre, Pascal Mongne se consacre principalement à l’évolution de l’image européenne des Amériques depuis la Découverte et à la question du Faux en art précolombien. Il est membre de l’ArchAm (« Archéologie des Amériques » UMR 8096, CNRS - Université Paris 1), du GEMESO (Groupe d’Etudes Méso-Américaines, EPHE) et du Comité français pour le Corpus Antiquitatum Americanensium (Union académique internationale).
Imposant autel quadrangulaire en basalte gris, sculpté avec vigueur sur ses quatre faces d’une évocation des jours du calendrier aztèque, avec une représentation sur deux côtés d’un féroce félin accroupi avec des crocs et des griffes sortis ainsi que des moustaches émergeant de motifs ondulés avec de petits cercles sur leur surface, et comportant des indications de nombres dont l’un représente la date « Un Jaguar » et l’autre « Dix Jaguars », sculpté sur un autre côté d’une figure anthropomorphe animée qui porte une peau déchiquetée et une impressionnante mâchoire supérieure de créature qui est probablement celle du « Sept Crocodile », Teociopactli, un monstre marin primitif asexué mi-crocodile mi-poisson avec un silex, ou couteau Tecpatl, qui sort de son dos, et sculpté sur son quatrième côté d’une représentation circulaire évoquant « Quatre Mouvement », la partie supérieure de l’autel représentant une iconographie partielle de Tlalteuctli, le Monstre de la Terre, avec ses griffes de félin distinctives en saillie lorsqu’il incarne ce rôle de monstre terrestre et qui encadre un bassin peu profond qui résulte peut être d’une transformation postérieure de la période coloniale.
Pour un autel monolithique aztèque réutilisé après la conquête comme réceptacle, voir Luján et Fauvet-Berthelot, Paris, 2005 : p. 174, n° 83.